Dans le cadre du programme « Je Choisis La French Tech », organisé pour renforcer les relations entre startups, grands groupes, ETI et administrations, la French Tech Grand Paris, RaiseLab, le Hub BPI et le CNA ont réuni lors d’une matinée dédiée, des experts et acteurs clés pour partager des retours d'expérience et définir les bonnes pratiques en matière de collaboration. Un événement qui a mis en lumière l’importance d’un partenariat innovant et structuré pour répondre aux enjeux actuels.
Une dynamique encore à renforcer
Selon le rapport de l'Observatoire des relations entre startups et grands comptes, piloté par Pierre Pelouzet, médiateur des entreprises, les achats auprès des startups ne représentent encore que 2,4 % des achats des grands groupes privés soit 4 Milliard et seulement 1 % des achats publics soit 1,8 Milliard en 2022. Ces chiffres, bien qu'en progression, montrent l'importance d'intensifier les partenariats pour atteindre l’objectif ambitieux de doubler ces achats d’ici 2027.
Pour Pierre Pelouzet, Médiateur des Entreprises :
« Un grand compte qui ne regarde pas l’innovation proposée par les startups, c’est un grand compte qui se met en danger. »
Des modèles de collaborations
Dans ce contexte, trois retours d’expérience (RETEX) ont illustré comment startups et grands groupes co-construisent des solutions stratégiques.
1. AID et XXII : intégrer l’innovation civile à la défense
L'Agence Innovation Défense (AID), créée pour répondre aux enjeux stratégiques de défense, a collaboré avec XXII, une startup française spécialisée dans les technologies d’analyse de flux vidéo en temps réel. Ce partenariat se distingue par l’intégration de solutions innovantes issues de l’écosystème civil dans le secteur de la défense.
- Contexte : L’AID, acteur clé dans le domaine de la défense, cherche à anticiper les évolutions rapides des technologies civiles pour les adapter aux besoins militaires. L’innovation dans des domaines comme l’analyse vidéo en temps réel est cruciale pour renforcer la sécurité nationale.
- Objectifs du partenariat : Le partenariat avec XXII vise à développer des solutions de détection d’intrusions via l’analyse de vidéosurveillance et l’intelligence artificielle. Cette technologie permet de traiter des volumes énormes de données en temps réel et d'identifier des comportements suspects dans des environnements sécurisés.
- A retenir :
- Facteur humain et compréhension des besoins : Selon Cyrielle Pautigny-Chaignon, acheteuse sénior à l’AID, le succès de la collaboration repose sur l’implication des équipes et la capacité à bien comprendre les besoins techniques et opérationnels des deux parties. Un dialogue continu est essentiel pour éviter les malentendus et garantir la réussite du projet.
- Transparence et simplification des démarches : L’AID a mis en place des outils pour faciliter la collaboration, comme la possibilité de contourner les appels d’offres dans des cas spécifiques. Cela a permis de gagner du temps et de favoriser l’innovation sans les lourdeurs administratives habituelles.
- Rôle des acteurs facilitateurs : Des organismes comme la French Tech Grand Paris, BPI France, et le CNA ont joué un rôle déterminant en agissant comme facilitateurs, permettant aux deux partenaires de se concentrer sur l’innovation sans se perdre dans la complexité administrative.
Côté startup, Victor L’Huillier, Head of Public Affairs and Business Development chez XXII confie : « Il faut avoir du culot, mais avec du respect ; et de prendre le temps de connaître les acteurs avec qui les startups souhaitent contractualiser. »
2. Groupe Deret & Spacefill : logistique collaborative au service de l’efficacité
Le Groupe Deret, un acteur majeur de la logistique en France, a trouvé un partenaire idéal en Spacefill, une startup spécialisée dans la digitalisation des processus logistiques. Ensemble, ils ont entrepris de transformer la gestion des flux logistiques dans 100 entrepôts à travers une plateforme collaborative.
- Contexte : Le Groupe Deret, avec ses nombreux entrepôts et son approche personnalisée, cherchait à standardiser et digitaliser ses processus logistiques pour améliorer l’efficacité et la transparence dans ses relations avec les clients.
- Objectif du partenariat : Spacefill a co-développé une solution numérique permettant de mieux gérer les flux logistiques tout en assurant une flexibilité maximale pour répondre aux besoins spécifiques de chaque client. L’objectif était de créer une plateforme standardisée mais adaptable à différentes situations logistiques.
- A retenir :
- Transparence dans les attentes : L’un des points clés du succès a été la transparence entre les deux partenaires. Spacefill a rapidement compris les besoins spécifiques du Groupe Deret et a aligné sa solution sur les objectifs de long terme du groupe.
- Partenariat gagnant-gagnant : L’idée n’était pas simplement d’imposer une solution, mais de travailler en co-développement. Spacefill a appris à mieux comprendre les spécificités d’un grand groupe et à ajuster son offre en conséquence.
- La flexibilité et l'adaptabilité : La plateforme développée pour Deret a permis d’introduire une nouvelle dimension dans la gestion des flux logistiques, tout en restant suffisamment flexible pour s'adapter aux besoins d’autres entreprises. Cette approche flexible a été cruciale pour maintenir un partenariat à long terme.
Côté startup, Maxime Huzard, co-fondateur et CEO de Spacefill, invite les grands groupes à faire preuve de transparence dans leurs échanges et à adopter une communication directe et professionnelle, comme ils le feraient avec leurs pairs. Les startupers sont avant tout des hommes et des femmes d'affaires.
3. FDJ & Sweep : vers une décarbonation ambitieuse
La Française des Jeux (FDJ), acteur majeur du secteur public, a collaboré avec Sweep, une startup spécialisée dans la gestion des émissions carbone, afin de répondre à l’un des défis environnementaux les plus complexes : la décarbonation du scope 3, qui représente la majorité des émissions indirectes dans la chaîne de valeur des entreprises.
- Processus : Le partenariat a été initié grâce à un sourcing structuré mené conjointement par les équipes innovation et achats de la FDJ, suivi d'un appel d’offres afin de garantir la sélection d’une solution parfaitement adaptée aux besoins de la société. Un premier POC (Proof of Concept) a permis de tester la solution avant de l’intégrer progressivement dans les processus internes de la FDJ.
- Objectifs du partenariat : L’objectif était d’intégrer Sweep au sein de la stratégie de décarbonation de la FDJ, en particulier pour gérer et réduire les émissions indirectes liées aux activités de ses partenaires et fournisseurs. Sweep a permis à la FDJ de mieux mesurer et piloter son empreinte carbone à travers une plateforme de gestion des données carbone, facilitant ainsi la collecte des informations nécessaires pour répondre aux exigences réglementaires et aux objectifs de réduction des émissions.
- A retenir :
- Alignement des priorités : Dès le début, la clarté des besoins et des objectifs communs entre Sweep et la FDJ a permis de poser une base solide pour la collaboration. Les deux parties ont partagé une vision commune, centrée sur l’impact environnemental et la mise en place de solutions concrètes pour atteindre les objectifs de décarbonation.
- Transparence et confiance : Les échanges réguliers et les points de suivi ont renforcé la relation de confiance entre les équipes de la FDJ et celles de Sweep. La mise en place de points de contrôle réguliers a permis de suivre l’évolution du projet et d’ajuster les actions en fonction des retours du terrain.
- Intégration au cœur de la stratégie de décarbonation : L’intégration de la solution dans la stratégie globale de la FDJ montre l’importance de travailler avec des startups capables de s’adapter à la fois aux exigences techniques et aux ambitions à long terme d’un grand groupe.
Une vision pour l’avenir des collaborations
Nathalie Leroy, Directrice Déléguée du Conseil National des Achats, a rappelé l’importance pour startups et grands groupes d’aller au-delà des attentes économiques pour se concentrer sur une véritable création de valeur.
« Le business, c’est la rencontre d’une offre et des besoins. Les startups doivent oser avoir une vision orientée création de valeur. »
Notre événement « Je Choisis La French Tech » a démontré que la collaboration entre startups et grands comptes n’est pas seulement possible, mais qu’elle est essentielle pour relever les défis de demain. L’objectif est clair : construire un écosystème innovant, agile et résilient, tout en renforçant la souveraineté technologique et écologique de la France.
Et maintenant ?
Les prochaines étapes : la mise en œuvre des recommandations du rapport de l’Observatoire et une mobilisation accrue pour effectivement doubler d’ici 2027 le recours aux startups françaises par les acteurs publics et privés, un prochain rapport est prévu courant 2025. Une ambition où chaque acteur – grand compte, ETI, administration ou startup – a un rôle clé à jouer.
